LANCIA DEDRA 1989-1999
On l'a surement oublié mais Lancia etait présent depuis les années 50 dans la catégorie de berlines compactes à 3 volumes. Aurélia, Flavia , 2000, Prisma, la Dedra s'inscrit donc dans une pure tradition de berline cossue et tranquille avec le savoir faire italien. En cette fin des années 80 la philosophie de la marque est de mettre en exergue confort et équipement
La Dedra sort donc en 1989 conforme aux attentes de la clientèle du segment avec une finition plutôt haut de gamme mais surtout bien au dessus de ce qu'il y a dans la maison mère Fiat. Elle a en effet été conçue sur la plate forme de la Tipo. De celle-ci a été dérivé la Tempra qui deviendra Dedra chez Lancia (et 155 chez Alfa). Si les mécaniques sont modernes pour l'époque avec arbre à cames en tête, injection électronique ou turbocompresseur sur le diesel, elle se veut globalement racée, élégante mais n'affolle absolument pas les chronos.
Pourtant le réseau est fort de 200 concessionnaires, l'image est bonne et la gamme dynamique puisque la marque a remporté pas moins de 7 titres de champion du monde de rallye à cette date, championnat qu'elle domine encore à la sortie de la voiture en 1989 puisqu'elle remportera encore les titres 89,90 et 91. Cette image sportive elle le doit à la fameuse Delta HF Intégrale reconvertie en Groupe A lors de l'arrêt du groupe B. Lancia travaille donc à un développement de sa Dedra pour proposer des versions plus dynamiques.
Pour l'heure les motorisations sont très calmes. Le 1.6 litres est donné pour 88cv (certains pays n'auront droit qu'à 78cv), le 1.8 litres pour 109cv et le 2.0 litres, version la plus puissante, pour 117cv et 200 km/h en pointe. Les blocs 2.0 litres et 1.8 litres sont d'ailleurs les mêmes et seuls l'allésage et la course sont différents. A noter que le 2.0 litres est également disponible avec une boîte automatique à 4 rapports à convertisseur de couple bien gourmand et avec une puissance ramenée à 113cv tout en abaissant le couple pour ne pas casser la boîte. (de 162 à 156 Nm) Seule la puissance fiscale est impressionnante à la vue des performances et chez nous dissuasive avec 12cv ! A la limite c'est la version diesel dite "Turbo ds" qui attire le plus sur le papier mais aussi en volume. Nous sommes d'ailleurs au début de l'air "diesel" qui mettra la main sur le gros des volumes immatriculés. Ce moteur est connu puisqu'il s'agit du 1929 cm3 qui équipait déjà le modèle précédent la Prima. Ici il a été revu et est muni d'un échangeur air/air permettant d'organiser un refroidissement et donc de pouvoir augmenter la pression de suralimentation et de passer de 80 à 90cv. Avec un couple de 186 Nm disponible à 2400 tr/min (ce qui aujourd'hui semble bien dépassé) la voiture offrait en fait dans la vraie vie des reprises meilleures que la 2.0 litres essence au couple inférieur. Sa concurrente directe de l'époque à ce niveau de gamme était l'Audi 80 1.9TD qui faisait 80cv.
Côté finition, Lancia en propose deux en essence et une intermédiaire dite en interne "confort" pour la diesel. D'ailleurs vous allez le constater, certains raffinements et équipements de série ou en option étaient habituellement réservés à la catégorie supérieure. L'une des finitions est sans nom particulier et l'autre sous le label "Symbol". La version de base n'a rien d'extraordinaire et semble être une Tempra haut de gamme. Il ne manque rien d'essentiel, certes, et le tableau de bord unique sur la Dedra est même en Bois de Rose. Les sièges sont en tissus, et les blocs compteur assez complets sont très lisibles. D'ailleurs les versions essence ont même droit à un économètre assez spectaculaire une fois en action (photo) alors que les versions 2.0 litres et diesel ont droit à la place à un plus utile manomètre de température d'huile et un voltmètre. La version Symbol est plus cossue. Jantes aluminium (y compris la roue de secours...), chauffage automatique, rideaux dans la lunette arrière et même un bel intérieur alcantara très complet. En effet en plus des sièges, l'accoudoir central avant (rare à l'époque sur ces gammes), les contres portes, les montants latéraux et le pavillon entier sont recouverts de ce revêtement qui donne indéniablement un aspect haut de gamme ! Les Lancia qui viendront lors des générations suivantes n'auront plus cette finition (seuls les sièges et contres portes auront de l'Alcantara). Dans la production actuelle équivalente en gamme, seul Citroen propose une ambiance dans le même esprit sur sa C5 avec l'option "cuir intégral" où hormis du cuir sur les sièges et la planche de bord, de l'Alcantara a été disposé sur les montants des ceintures et l'ensemble du pavillon. Certaines options étaient au catalogue comme l'ABS, la climatisation automatique, le toit ouvrant électrique en verre, la sellerie cuir "Poltrona Frau" (logo gravé dans les appuis têtes) avec sièges électriques et chauffants ou encore la suspension à amortissement contrôlée sur la 2.0 litres, qui avec le temps est devenue comme toutes ces suspensions, une usine à gaz ! L'autre particularité en vogue du moment était d'obtenir un bloc compteur électronique qui avait pour effet de défigurer le tableau de bord (photo). Enfin à noter que toutes les versions pouvaient bénéficier d'une option peu fréquente sur les carrosseries 3 volumes : la banquette arrière modulable.
Raffinement, élégance, finition ou lignes tendues, Lancia qualifie d'ailleurs bien sa Dedra en étant " la synthèse parfaite entre respect d'une tradition et innovation". Pourtant elle reste dans l'ombre de la grande soeur, la plus prestigieuse Thema aux finitions également relevées et dont la version 2.0 Turbo 16 est redoutée avec 201cv (sans parler de la 8.32 à moteur Ferrari déjà traitée dans mon blog). Mais il y a aussi la Delta dont la deuxième génération a du mal à faire oublier la première HF devenue myhtique. Lancia décide alors de proposer des version plus musclées et dignes de son rang en implantant l'ancienne version du moteur 2.0 litres turbo 8 soupapes utilisé autrefois sous le capot de la Thema et de l'implanter sous le capot de sa Dedra. La transmission intégrale sera également récupérée de la Delta HF turbo. L'objectif est de contrer tout l'armada des 405 Mi16, BX GTi 16s et autres R21 2.0 Turbo 2 ou 4 roues motrices
Contre toute attente ce n'est pas une Dedra sportive mais bel et bien deux versions qui apparaissent alors au catalogue de mai 1991. La Dedra 2000 Turbo et la Dedra Integrale sont alors commercialisées. Les deux voitures sont mues par le même moteur turbocompressé. Il développe 165cv sur la 2000 Turbo et 177cv sur la version Integrale dont l'idée avait été déjà exploitée sur la Prisma 4WD. Les deux versions disposent d'un nouveau système dit Boostdrive qui permet de varier la pression de suralimentation en fonction de la sollicitation de l'accelerateur. Ce système remplace l'overboost qui était initialement installé avec ce moteur sur les Thema et Delta HF. Le boostdrive se veut plus réactif que l'overboost qui n'offrait que la possibilité d'augmenter la pression du turbo à pleine charge et ce pendant 30 secondes uniquement. Avec ces deux nouvelles versions et ces deux puissances, Lancia tente d'introduire sa Dedra dans le cercle porteur des routières sportives d'une part mais aussi sur le créneau plus sélectif des routières intégrales avec bien évidemment Audi et son système Quattro dans le viseur. Si la Dedra 2.000 Turbo est équipée d'un viscocoupleur sur le train avant, l'Integrale est elle une 4x4 permanente à tendance traction avec une répartition de 56% à l'avant et 44% sur l'arrière. Mais alors pourquoi diable deux puissances ? La raison est en fait assez simple. La transmission intégrale rajoutant 100 kilos à la voiture, Lancia souhaitait obtenir les mêmes performances sur ces deux Dedra. La 2000 Turbo récupérait donc la puissance du moteur initial, alors que la version intégrale profitait d'une version augmentée de 12cv avec la même pression de suralimentation de 0.95 bar mais avec une gestion électronique de l'injection différente. Ainsi vitesse de pointe de 215km/h et 1000 mètres départ arrêté réalisé en plus ou moins 29 secondes étaient quasi identiques. Le couple des deux versions est légèrement différent avec 27.9mkg pour la 2x4 et 28.4mkg à 3000tr/min pour l'intégrale. Sur la route, c'est bien la version 2 roues motrices qui s'averrera plus veloce du fait de l'écart de poids. Les consommations sont, dans les deux cas, imposantes : compter 10 à 11 litres de moyennes mais les 20 litres sont accessibles sans difficultés en mode sport. Esthétiquement les deux auto se voient doté d'un aileron positionné sur la malle arrière. Pour le reste mis à part les plaques de désignation pas grand chose de sportif si ce n'est que la présence de la suspension pilotée d'origine, et ce encore,selon les pays de commercialisation. L'équipement est par contre très complet et place les deux protagonistes aux avant postes sur la partie luxe. La seule particularité de l'Integrale est situé dans son coffre puisque la roue de secours y est disposée dans une housse la trappe sous le plancher prévue pour les version 2x4 étant là supprimée. Malgré ces efforts, la marque ne parviendra pas à imposer sa berline dans la catégorie des sportives et seuls les amateurs connaissent leurs existences alors même que les R21 turbo et 405 Mi16 connaissent au même moment chez nous un réel engouement. Pourtant en performances chronométrées la Dedra est certes derrière la redoutable R21 Turbo mais devant la 405Mi16 ! Avec l'arrivée de la norme Euro 1 en 1993, imposant la pose de pots catalytiques sur les modèles essences, les puissances des Dedra chutent et passent respectivement pour les deux versions à 162 et 169cv diminuant de ce fait leurs performances. Bien loin des tempéraments de feu telle la R21 Turbo, y compris en version Quadra, la Dedra ne fera vibrer personne sur la route mis à part quelques puristes aveuglés par la vielle Thema elle même devenue la fade Kappa. L'ultime version sportive baptisée pourtant HF équipée de sièges en Alcantara Reccaro et d'un volant cuir 3 branches ne changera rien. La preuve tout le monde l'a oubliée !
Au renouvellement de la gamme en 1995, Lancia décide de réorienter son image en arrêtant les versions sportives, en renouvelant les moteurs atmosphériques avec l'apport de culasses à 16 soupapes et en commercialisant une version break dite SW construite en France chez Heuliez. Ainsi le moteur 2.0 litres passe de 113 à 139cv (après être passé de 117 à 113 cv en 1993) et dans la foulée en 1996, Lancia booste de la même façon la version 1.8 litres qui passe ainsi de 103 à 118cv (après lui aussi être passé de 109 à 103cv en 1993). En fait ce nouveau bloc 1.8 litres est issu du nouveau 5 cylindres de la marque. Certains pays auront droit à la version 131cv sous l'appellation 1.8 VVT en lieu et place du 2.0 litres. Lancia espère ainsi se relancer en se replaçant différemment sur l'échiquier de la berline routière avec un esprit dorénavant plus axé luxe et confort. C'est à ce moment qu'apparaissent des équipements comme le cuir ou les sièges électriques. Côté technique la version boîtes de vitesses automatique lancée en 1994 sur le moteur 2.0 litres est reconduit et une version intégrale est à présent disponible sur le 2.0 litres SW uniquement.
Las, 1998 sonne pratiquement le glas du modèle puisque la gamme se voit nettement simplifiée et avec quelques ultimes retouches esthétiques. Les feux sont à présents fumés à l'avant comme à l'arrière, et le plastique imitation bois (façon Ford) a remplacé le bois de rose sur le tableau de bord. En septembre 1999, la Dedra s'arrête définitivement pour passer le témoin à la Lybra sur laquelle Lancia a placé beaucoup d'espoirs. La voiture restera officillement au catalogue jusqu'en début 2000 afin d'écouler les stocks. La marque italienne entre dans une période stylistique néo-rétro destiné à se démarquer de la production de masse de la maison mère Fiat avec un style volontairement plus affirmé qui sera très contesté. Lybra, Thésis (déjà présente dans mon blog), on sait à présent que ce nouveau virage sera, pour Lancia, une ultime sortie de route violente au point de n'exister depuis quelques temps sous perfusion après avoir essentiellement commercialisé ces dernières années des produits Chysler rebadgés. L'avenir de la marque ne sera qu'Italien puisque la dernière phase de son Ypilon va être présenté dans quelques jours au salon de Francfort et ne sera disponible qu'en Italie seul pays où la marque sera d'orénavent présent. La mise en sommeil de la marque est donc programmée.
418027 Dedra auront été fabriquées avec à priori un peu moins de 45 000 versions breaks SW.
Valeur de transaction : 2.0 litres turbo et Integrale : de 2 000 à 3 000€. Une version Bulgare poussée à 455cv est même disponible à la vente sur le net contre 8000 € !
La berline avec l'intérieur Alcantara :
La version 2000 Turbo et Intégrale avec l'aileron de malle arrière :
La version Station Wagon construite chez Heuliez :
Le tableau de bord classique (version avec l'option airbag et climatisation) :
L'option digitale très surprenante mais assez tendance à l'époque chez Fiat (volant d'origine, option climatisation et suspension pilotée) :
Si la Dedra était souvent équipée du chauffage automatique voir de la climatisation au bloc de commandes bien intégré, la version "boutons de gazinière" existait aussi ! Une vraie Fiat Tempra alors :
La version intégrale disposait d'une commande spécifique de blocage de différentiel :
L'intérieur de l'Integrale HF avec sièges Reccaro suir/Alcantara, volant cuir et tableau de bord électronique. Petit détail : la voiture disposait là de la climatisation régulée assez semblable visuellement au chauffage automatique. Seule une touche "eco" était présente sur la colonne du centre en haut des touches de commandes ainsi qu'une bouche d'aération complémentaire bien visible sur ce cliché au centre sur le dessus de la planche de bord (non présente sur les versions sans clim) :
photos internet