MERCEDES A W168 / 1997-2004
En ce milieu des années 90, Mercedes souhaite se démocratiser quelque peu, rajeunir son image de marque et surtout toucher une autre clientèle. Voilà qui est compliqué sur des marchés où la berline traditionnelle voire la routière dont la marque allemande a fait son coeur de gamme depuis des décennies au point de ne plus rien avoir à prouver. Rassurée par les volumes de vente de la petite Classe C sortie en 1993 qui elle même succédait à la gamme 190 sortie en 1982, Mercedes souhaite rééditer le challenge d'un nouveau format de véhicule plus accessible encore afin d'aller ratisser sur les plates bandes des constructeurs généralistes. Volkswagen, Audi, Opel, Ford sont dans son viseur tout comme Peugeot, Citroen, Renault ou encore Fiat.
Ainsi née la Classe A, issue de la réflexion du concept-car de 1982 NAFA 2 places (proche esthétiquement d'une voiturette et intellectuellement de la future Fortwoo) ainsi que ceux plus avancés de 1991 et 1993 : le Studie-A 93 et le Vision A-93. Le résultat fait totalement bousculer les habitudes de ce constructeur disons le très traditionnel. Sous un format de monospace compact, Mercedes passe à la traction avant après l'avoir inaugurée sur des versions utilitaires et dérivé (Vito et Classe V en 1996) alors que la totalité de sa gamme est en propulsion ou en transmission intégrale comme sur le 4x4 Classe G ou encore comme sur les marginales E dont le système bien connu de nos jours 4 Matic lancé pourtant en 1987 peine encore à convaincre la clientèle elle aussi très conservatrice. Compte tenu que cette Classe A est longue de seulement 3.57 mètres, Mercedes est contraint de développer des motorisations et transmissions spécifiques et très compactes afin de les intégrer au châssis. Les ensembles rentrent en effet au chausse-pied sous le capot, et un angle de 59° est nécessaire pour l'implantation transversale, la marque étant habituée, comme BMW d'ailleurs, à des implantations moteurs dites "tout en ligne".
Présentée au Salon de Genêve 1997, cette A est alors exclusivement une 5 portes et 5 places. Deux moteurs sont au programme : un 1397 cm3 de 82cv et un 1596 cm3 de 102cv.Les appelations sont alors conforme à l'ensemble de la gamme et en adéquation avec la cylindrée moteur (ce qui n'est plus trop le cas sur les gammes actuelles de la marque) avec la A 140 et la A 160. Disponibles en boîte mécaniques à 5 rapports mais également en boîtes automatiques, ces deux versions ont une tarification annoncée en juin 1997 qui va de 109 500 F à 128 500 F pour la finition de base dite "Classic". A cela pouvait s'ajouter les finitions plus cosies ou sportives à 9500 F de plus pour les gammes "Elégance" et "Avantgarde".
La production de cette nouvelle A débute en octobre 1997 et rapidement des exemplaires sont mis à disposition des journalistes essayeurs de la presse pour les essais sensés les séduire. C'est alors la stupéfaction dans le monde entier. Pour la première fois, une Mercedes échoue en Suède au fameux test d'évitement dit de l'Elan à seulement...60 km/h. La voiture avec 5 personnes à bord et 75 kgs de bagages dans le coffre part à la renverse pour finir sur le toit ! Réfutant dans un premier temps toute faute ou mauvaise conception, allant jusqu'à mettre en cause le manufacturier des pneumatiques Goodyear, la direction de la marque enchaîne les réunions de crise pour affronter le tôlé mondial. Lors des nombreuses réunions qui comprenaient entre 7 et 30 personnes, le programme dans sa totalité a été remis à plat, décortiqué afin de trouver les causes de cet échec afin de trouver une solution rapide. Dans l'attente, le constructeur se voit obligé de stopper production et commercialisation. C'est un véritable cataclysme dans les entrailles de la marque à l'étoile tant réputée pour ses protections passives et actives. Le patron de Mercedes d'alors va jusqu'à proposer sa démission qui est refusée par celui de Daimler. Face à la crise, la marque décide de jouer la transparence et une solution technique fiable est trouvée. Elle provient de son sous traitant Bosch qui a développé et mis au point un équipement devenu depuis 2012 obligatoire sur tous les nouveaux modèles circulant en Europe : l'ESP.
Ce dispositif proposé depuis 1995 uniquement sur sa Classe S, est installé d'origine et une campagne de rappel sur les A déjà produites est réalisée afin de réaliser son implantation via le réseau. Mercedes sait alors qu'il joue clairement sa réputation et n'a pas le droit à l'erreur. Les tests internes et ceux de la presse spécialisée étant réalisés sans encombres, la production et commercialisation sont relancés suite à l'adoption de série sur toutes les versions de cet ESP, mais également d'une suspension durcie, d'une garde au sol diminuée et de l'implantation d'un dispositif de freinage d'urgence BAS.
Ce lancement calamiteux que j'ai volontairement remis à la lumière dans ce billet, nous montre combien une fâcheuse situation peut vite ébranler une réputation si grande soit elle face à un échec ou une triche (dieselgate). Ce risque est de nos jours présent au quotidien avec désormais des réseaux sociaux à l'affût qui diffusent via leurs communautés de bonnes mais aussi de fausses informations en direct ou se diffusant en seulement quelques minutes.
Quoi qu'il en soit, Mercedes a su assez rapidement gérer la crise et poursuivra sans trembler son tableau de bord de commercialisation. Ainsi dès janvier 1998, la A est présentée dans une version diesel très attendue. Là aussi le bloc est inédit puisqu'il s'agit d'un 1689 cm3 de 90cv pour cette A 170CDi. Tout comme la C 220CDi apparue en mars 1998, le constructeur fait appel à l'injection directe vouée à se généraliser.La rampe d'injection Boch commune permet d'assurer une pression de 1350 bars avant la distribution aux 4 injecteurs. Cette technologie à l'époque peu répandue avait pour effet une meilleure combustion et gestion moteur afin d'asurer des consommations inférieures. Au volant, les reprises sont plus volontaires que les versions essences ce qui est logique puisque le couple moteur d'un diesel est disponible plus bas dans les tours et se voit boosté ici par un turbo. Avec un couple de 180 Nm disponible dès 1600 tr/min, la A 170 CDi offre des prestations et consommations très honnêtes malgré un niveau sonore dans l'habitacle très présent avec un bruit moteur fatiguant à la longue. Avec cette motorisation, la marque prévoit une commercialisation à 60 % de sa gamme en diesel. Afin d'atteindre les volumes, la marque propose également une version société CTTE 2 places à TVA récupérable pour seduire également les entreprises. Cette motorisation sera proposée au prix identiques de la version 160 essence afin de monter plus facilement les volumes de vente.
Bien lancée, véritable produit de conquête, la A souffre cependant d'un déficit sportif très net. Avec 102 chevaux maximum, elle n'a certe pas le tempérament sportif mais n'en a pas non plus la motorisation. Cet oubli sera comblé dès juin 1999 avec l'apparition de la version A 190 Elégance ou Avantgarde destinée à rajeunir encore sa clientèle. Le moteur là encore spécifique 1.9 litres propose désormais 125cv à la A avec un couple de 180 Nm, identique au diesel donc mais disponible à 4000tr/min. Plus sportive, la A190 l'est assurément car son poids plume lui assure le 0-100km/h en 8.8 secondes avec une max de 198 km/h. Cette version plus tonique bénéficie d'une boîte également spécifique avec les derniers rapports raccourcis. Un embrayage piloté (4500 F soit 686€) tout comme une véritable boîte automatique sont disponibles en option. A cela s'ajoute une traditionnelle longue liste d'options dans la pure tradition de la marque avec du cuir, de la climatisation régulée, des packs Evolution ou Luxe, des optiques spécifiques AMG, des jantes Alu AMG, de la navigation également ou encore un toit ouvrant panoramique à lamelles qui s'avèrera très peu fiable à l'utilisation et très coûteux sur plusieurs générations de A et B à la réparation. Méconnu de tous, cette A 190 pouvait également se transformer à partir de septembre 1999 en 4 places (y compris la carte grise) en recevant gratuitement 2 sièges arrières séparés en lieu et place de la banquette modulable.
La Classe A sera présentée retouchée à partir d'Avril 2001. Elle gagne alors 4 cms en longueur, reçoit quelques retouches esthétiques au niveau des faces avants et arrières ainsi qu'une insonorisations revue. L'ensemble des motorisations sont reconduites avec quelques légères évolutions sans grand intérêt mais une version moins puissante diesel est proposée. La A 160CDi reprend le bloc de la 170 mais voit sa puissance dégonflée à 75cv pour un couple de seulement 160Nm. Sans saveur, cette version permet à Mercedes de proposer des tarifs contenus de son modèle. Mais la grande nouveauté de cette phase 2 est la version dite Family. Son nom de code V168 cache une version longue de 3.77 mètres et que l'on nommerai sur une berline comme étant "limousine". Par cette version, Mercedes tente de satisfaire à la demande des familles plus tentés par un Renault Senic plus spacieux qu'une Classe A traditionnelle jugée trop petite. Cette version Family a également droit à la version à tendance sportive 190. Toutefois cette version de 125cv avoue ces limites et une version 2.1 litres dite 210 voit le jour en janvier 2002 sur les 2 châssis. La puissance atteint alors les 140cv et le cap des 200 km/h en pointe est dépassé. Avec cette motorisation qui plus est agrémentée du kit carrosserie AMG, la marque tente de séduire une clientèle plus haut de gamme mais dans la même catégorie. Extérieurement la voiture reçoit des jantes de 17'' dans l'esprit du fameux préparateur ainsi qu'une double sortie d'échappement. A l'intérieur, le garnissage en cuir et alcantara avec sièges avants sports est d'origine sur fond d'inserts et de pédalier en alu. La voiture est dynamique sur la route même si le confort est ferme, et la position de conduite atypique fatigante. L'utilisateur préfèrera évoluer sur des enrobés de type billards plutôt que des routes sinueuses à la chaussée dégradée.Reste le prix...qui frôle hors options 197 000 F soit presque 30 000€.
Cette Classe A sera remplacée en 2004 par une deuxième génération plus aboutie. Elle aura dépassée le cap des 1 100 000 exemplaires, comme quoi un lancement catastrophique n'est pas synonyme d'échec commercial. La Classe A sera naturellement agrémentée de quelques séries spéciales dont la plus originale sans conteste est les 250 A des versions Hakkinen et Coultard (125 exemplaires par pilote pour fêter le doubler des pilotes McLaren-Mercedes en 1998. Cette série limitée sportive ne reprenait en fait que la motorisation de la A 160 de 102cv... Quelques versions usines ou privées seront également construites. C'est le cas des A Necar 3 ou 4 et de la A F-Cell construite elle à 60 exemplaires qui sont des prototypes de pile à combustible mais aussi de la A Zebra qui est une version unique 100% électrique ainsi que la A HyPer qui est pour sa part une version hybride essence. D'autres version ont été élaborées par le département compétition AMG. Il s'agit de la A 190 Twin qui reprend les caractéristiques de la A190 mais avec une transmission intégrale, de la A21 AMG de 140cv mais aussi de la version dite 38 AMG construite à 5 exemplaires pour le circuit mais restée sans lendemain commercialement. Elle était motorisée par un moteur V6 3.8 litres et possédait une transmission intégrale. La dernière version privée a été commandée à AMG directement. Prévue A50 pour l'utilisations du V8 5.0 litres du préparateur, elle finira faute de place sous le capot en A32 K c'est à dire munie du V6 à compresseur repris de la SLK 32 AMG. Cet exemplaire unique a été totalement repensé et homologué. Il possédait un compteur gradué jusqu'à 300 km/h pour une vitesse bridée à 250 km/h, réalisait le 0-100 km/h en 5 secondes et disposait de 354cv disponible sous le capot.
Valeurs de transaction : A 190 : jusqu'à 2000€, A 210 : jusqu'à 3000€
La Classe A et un coloris typiquement allemand :
L'habitacle :
Le fameux échec du test qui faillit couter sa carière à la voiture :
La version Famlily sortie en 2001 et visuellement assez difficile à identifier malgré ces 17 cms complémentaires :
L'implantationdu moteur et de la transmission atypique (l'extrémité noire étant visible sous le capot et la suite partie alu disposée sous le châssis en étant fortement incliné) :
La A 38 AMG :
La A32 K AMG :
La version pile à combustible :
La version limitée Hakkinen / Coultard. Ici l'une des 125 versions Hakkinen :
L'un des concept NAFA de 1982 :
Et le Vision A 93 plus abouti :
photos internet