LEXUS LS 400 / 1989-1994

Nous sommes en 1983 en pleine négociation de quotas d'exportation pour le groupe Toyota. Il y a l'Europe alors où les constructeurs français font tout pour freiner l'avancée des constructeurs japonnais (Mr Jacques Calvet en tête) mais aussi et surtout les USA sur lequel la marque du soleil levant a de grosses ambitions. Le président de Toyota décide donc de lancer un vaste programme afin de construire la meilleure voiture du monde. Ce projet porte le nom de F1. Rien à voir avec le désir de s'investir dans la catégorie reine de Formule 1 pourtant vitrine technologique mondiale qui était en cette saison en pleine mutation entre l'ère "turbo" et l'ère "atmosphérique". Non F1 signifie porte drapeau 1er du nom en anglais : Flagship 1. 

Pour ce projet très ambitieux, c'est carte blanche pour partir justement d'une page blanche. Pas question en effet de retraivailler et reprendre une Toyota existante (la Cressida par exemple) avec une carrosserie spécifique et un nouveau logo à la façon qui est passé de SEAT à CUPRA de nos jours. Là, le travail de fond commence par une immersion aux Etats-Unis par des chercheurs de la marque, qui vont jusqu'à louer une maison sur Laguna Beach en Californie afin de s'impreigner des habitudes locales mais aussi des besoins et attentes sur un marché où les marques nationales comme Cadillac ou Lincoln sont bien présentes tout comme le premium européen, Mercedes, BMW ou encore Audi. Le premier grand enseignement est qu'un modèle de luxe tel qu'il est envisagé doit avoir son propre réseau de distribution. C'est toujours d'actualité puisque le groupe allemand Damler Benz a prouvé à Toyota qu 'il avait eu raison. En effet, On ne vend pas une Maybach si prestigieuse soit l'histoire en étant une Classe S avec une calandre et juste un confort spécifique le tout dans le réseau Mercedes ! Cette option se termine toujours par un échec et au mieux en devenant une simple finition d'une gamme. Il en est de même pour Ghia ou Vignale où les oeuvres de carrosseries d'antant sont bien loin même si les noms existent toujours au sein de la gamme Ford.

C'est dans ce contexte de base que le projet F1 démarre avec un budget illimité. Rapidement ce sont 4000 personnes qui vont être sélectionnées et recrutées pour donner vie au projet. Lexus est créé officiellement en 1987 et au bout de 973 prototypes (dont 14 à la bonne échelle en 16 mois), 4.5 millions de kilomètres parcourus avec 450 des prototypes et 1 milliard de dollars d'investissement, la version définitive est présentée en 1989 au salon de Detroit. Cherchant à commercialiser une grosse berline comme premier modèle, la LS 400 est découverte par le grand public. Outre sa stature de paquebot avec ces 5 mètres de long, c'est bien le tarif qui interpelle. En effet elle est affichée toute équipée et sans options possibles à 35 000 dollars alors que les BMW Série 7 ou Mercedes Classe S s'affichent à 60 000 ! En France où elle arrive au tarif discrètement dans le réseau Toyota en octobre 1993, elle est à 420 000 Francs alors qu'une AUDI A8 avec son V8 s'affiche à 539 000 Francs, une BMW 740iA hors options est affichée à 485 000 Francs et une Classe S 500 BA Mercedes à 582 400 également hors options.

Si esthétiquement je trouvais à sa sortie cette LS 400 massive et quelconque pour ne pas dire moche, l'entrée dans l'habitacle imposait le respect tant le confort était omniprésent. Vaste, il était fait de cuir souple disposé jusque dans les contres portes et pleins de boutons de réglages à l'avant. L'ouverture de la porte arrière était un appel à venir profiter de ce canapé roulant qui nous tendait les bras. Les larges sièges avants donnaient plus la sensation de fauteuils de salon en cuir qui entrait en totale opposition avec la production japonaise d'alors. Le bois présent avec 24 essences référencées, les boutons de réglages destinés au confort étaient également présents partouts. La climatisation régulée avec même des commandes séparées à l'arrière bien sur mais aussi la hi-fi avec K7 badgée Lexus, les lave- phares ou l'antipatinage, tous situés sur la console centrale. Sur la contre porte du conducteur, les commandes de réglage électrique du siège avec 2 mémoires intégrées et sous le volant le grand luxe : le réglage électrique de la colonne de direction. Petit rappel : nous sommes en 1989 !

Nous voilà derrière ce grand volant en cuir muni d'un airbag (d'où sa dimension), le pommeau en cuir sous la main et deux surprises bluffantes nous attendent. Face à nous le bloc compteur est...noir. Seul le compteur kilométrique à rouleau est visible en extérieur dans sa partie basse. Le pied sur le frein, la clé se tourne vers le cran du lancememnt du moteur. La magie opère. Le bloc à aiguilles s'éclaire grace à un système par réflexion et à base de tubes fluorescents qui donne la sensation d'avoir des aiguilles en forme de sabres voir à affichage tête haute actuel. Le compteur est gradué jusqu'à 280 km/h et le compte tours jusqu'à 8000 tr avec une zone rouge débutant à 6200. Entre les deux, le rappel du rapport engagé est en couleur. Il s'agit d'une boîte automatique à 3 rapports munie d'un overdrive mais dont je n'ai pu pour le moment m'assurer qu'elle était de provenance Aisin, uné référence dans le milieu de la BVA. Le moteur est lancé. Il faut pourtant bien regarder le compte tour dont l'aiguille est située à 900 tr/min pour s'en assurer tant le silence est présent. Le V8 4.0 litres de 245cv développé spécifiquement est une oeuvre d'art. Badgé V8 FOUR CAM 32, il embarque tout le meilleur savoir faire des motoristes nipons de l'époque.  Particulièrement équilibré et silencieux, il s'avère d'une très grande souplesse et est quasi inaudible dans l'habitacle quelque soit le régime et la vitesse, aidé il est vrai par les quelques 200 kilos d'insonorisants disposés partout sur la voiture. La suspension pneumatique dont l'idée est reprise à Mercedes qui l'avait mise en place sur sa fameuse 600 puis sa classe S amplifie l'absence de vibrations tout en maintenant une assiette constante. D'ailleurs en guise de démonstration, Lexus n'avait pas hésité à mettre une pyramide de coupes de champagne sur le capot (photo). Disposée sur des rouleaux, la voiture fut démarrée et poussée à une vitesse équivalente à 240 km/h. A cette vitesse les coupes n'ont pas bougées !  Avec une vitesse de pointe de 250 km/h et une consommation moyenne de seulement 10.5 litres, Toyota a réussit le pari de venir bousculer les marques premiums bien en place et de faire techniquement mieux. La LS 400 était un réel tour de force pour la maqrue japonaise puisqu'elle n'avait jusqu'alors jamais produit de véhicules à ce niveau de gamme ni voitures, hormis la Supra, qui dépassaitent les 175 km/h !  

Rapidement cette surprenante berline imposante, innovante et haut de gamme sera rejointe par une autre berline berline plus petite et "plus" abordable à moteur 6 cylindres de 220cv : la GS 300. Toyota s'emploira ensuite de continuer à développer la gamme avec un coupé par exemple mais aussi et surtout de créer un réseau à part dédié à la marque. C'est en 2005, qu'un autre virage novateur est pris avec la commercialisation du SUV RX 400h à motorisation hybride essence et électrique. Ce tournant visionnaire permet aujourd'hui à la marque de posséder une avance technologique et une crédibilité indéniable face aux constructeurs premiums historiques qui suivent cet évolution technique pour leur part à marche forcée. 

Valeur de transaction : environ 9000 € pour une LS de 100 000 kilomètres

 

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