AUSTIN ROVER METRO 6R4 CLUBMAN / 1984-1985
La Metro 6R4 est certainement celle qui a eu la gestation la plus lente. Étudiée parmi les toutes premières prétendantes, elle arrive au moment où la fin de la recrée va être sifflée ! Sportivement on est donc resté sur sa fin mais les 200 exemplaires nécessaires à l'homologation en groupe B ont quand même été produits
L'aventure de ce drôle d'engin débute donc en 1978 avec le rapprochement de "survie" des marques Rover, Triumph, Austin et MG avec une entité qui sera British Leyland. L'industrie britannique alors moribonde n'a plus réellement de gamme commerciale passionnante et l'engagement en compétition passe par les fameux coupés Triumph TR7 en 4 cylindres et en V8 (TR8) pour la partie rallye mais aussi par la grosse et lourde Rover 3500 dans son exécution dite "Vitesse"(un doux rêve) pour les circuits.
A l'annonce du groupe B en 1980, le service compétition du groupe British Leyland se rapproche de l'écurie Williams de Formule 1 pour développer sa future arme de combat. Plutôt que de faire évoluer de façon ultime la TR7 en fin de carrière, il est pensé à une curieuse implantation : mettre le gros V8 Rover (d'origine Buick) de la Vitesse sur le châssis de la petite dernière du groupe à savoir celui de la citadine Metro ! La marque table sur la carte de la grosse cylindrée plus souple, plus fiable que la marque maîtrise plutôt que la piste de la suralimentation qui la plongerait dans la grande inconnue. Compte tenu des dimensions du moteur, du gabarit de la voiture, de l'équilibre des masses obligeant à reculer le plus possible l'équipage vers l'arrière avec le moteur positionné à l'avant comme la voiture de grande série, décision est prise de basculer le bloc en position centrale arrière. Une chose était déjà certaine : les roues seraient obligatoirement à l'extérieur de la caisse forcement trop petite pour tout accueillir. Les mois passent l'étude avance en observant les prétendants : la Renault 5 Turbo avec son moteur situé à l'arrière dont la marque reprend l'idée, tout comme Audi et sa transmission intégrale Quattro. Sans oublier Peugeot qui présente sa 205 T16...
Le V8 doit donc affronter la horde des moteurs turbocompressés qui arrivent avec leurs petites cylindrée survitaminées. La marque anglaise réfléchit à l'intégration de ce gros moteur dans sa voiture mais aussi dans la réglementation du groupe B. Moteur V8 ou plutôt V6 ? Au final après avoir retenu puis rapidement écarté le V6 Honda, un prototype réalisé en partenariat avec l'écurie Williams de formule 1 est testé dès avril 1983 sur un aérodrome puis en Espagne en 1984 avec le V8 de 3.5 litres bien connu sur lequel 2 cylindres ont été neutralisés afin d'obtenir la cylindrée de 2.5 litres pour une puissance de 250cv et être ainsi dans la même classe que les autres marque concurrentes à moteur turbo (avec le fameux coefficient de correspondance de 1.4). Le "pseudo" V6 respire convenablement sur cette base de Metro turbo (présentée déjà dans mon blog) avec une prise d'air importante de type Naca (photo) mais la problématique de la mise au point est plus difficile puisque l'équilibre des principales masses du trio moteur-transmissions-équipage n'est pas des plus évident à établir pour cette puce de la route de seulement 3.65 mètres de long (la 205 fait 3.82m) avec ces roues de 13 pouces. Les ingénieurs devront passer par la case soufflerie pour résoudre les problèmes de stabilité et d'évacuation des gaz chauds. La solution oblige une déformation importante de la carrosserie avec des entrées d'air importantes mais aussi pas l'utilisation d'ailerons de formule 1 de chez Williams ! Ainsi équipée de sa pelle avant, son aileron de toit et de ces ailes déformées la Metro est prête à un test grandeur nature. C'est chose faite fin 1984 en Grande Bretagne où la voiture est dans le coup mais connaît des problèmes de freinage. Les roues passeront ainsi à 15 pouces (16'' sur asphalte) afin d'augmenter les diamètres des disques. Les suspensions sont également modifiées obligeant le capot avant à avoir deux énormes bombages.La Metro 6R4 est née : 6 cylindres Rallye 4 roues motrices.
Complètement difforme et on peut même dire bodybuildée, la Metro est donc enfin officiellement présentée en mai 1985 après un nombre certain de participations à des rallyes nationaux pour sa mise au point. Le V6 définitif a été développé spécialement par un ancien de chez Cosworth compte tenu qu'une production de 200 exemplaires de route est obligatoire. Entièrement en aluminium, il ne s'agit plus du V8 tronqué mais d'un V6 de 2991cm3 baptisé V64V (pour V6 4 soupapes par cylindres ) qui développe alors la puissance respectable de 380 à 410cv pour la course. Pour la version "civile" qui nous intéresse ici la vouture se nommera " MG Clubman". La marque a du faire face à une difficulté importante. La version route devant être une copie très proche de celle de course, l'aileron avant rendait son homologation impossible pour une utilisation au quotidien et surtout en milieu urbain (sécurité en cas de choc piéton par exemple). De ce fait la marque décide d'homologuer ces voitures pour la route mais prêtes à courir. En effet, la réglementation du groupe B impose la quantité à produire (200) sur une période déterminée (12 mois) mais pas l'obligation qu'elle soit destinée à la route ! Fort de cette subtile interprétation, la version Clubman est produite avec quelques différences toutefois par rapport à la version usine de course. Outre la puissance du V6 ramené à 250cv et une boîte de vitesse synchronisée, elle possède des sièges baquets plus "conforts" mais surtout non personnalisés. Le tableau de bord, les manivelles des vitres ainsi que le volant 3 branches cuir sont issus de la Metro de base et de la turbo pour ce qui est du volant. Pas de moquette, pas de tapis, pas de garnitures : les tôles sont à nues ! Pas d'isolation non plus pourtant les bouchons anti-bruits n'étaient pas fournis. Bref pas de chichi, on est là pour la course. Les performances de la voiture sont convaincantes, le V6 étant très souple avec un couple constant permettant d'exploiter au mieux l'auto entre 3000 et 7000 tr/min. Avec moins de 5 secondes pour le 0-100 km/h on est tout de suite dans le rythme. La vitesse de pointe n'est qu'estimée car jamais vérifiée et sans réel intérêt en fait. On parle de 170 km/h. La voiture n'est donc pas prévue pour être homologuée pour la route du quotidien. Preuve en est , il n'y a pas d'emplacement prévu pour la plaque d'immatriculation avant (fixation sur le capot) et de plus faire le plein de la voiture est non seulement une contrainte avec sa consommation moyenne (21 litres/100kms) mais aussi une punition. En effet les deux réservoirs de 52 litres sont équipés de soupapes à remplissage rapide comme en compétition et se remplissent uniquement à l'aide d'une nourrisse de "compet", le pistolet classique des stations ne pouvant pas y être introduit !
Sur la route, la voiture "usine" est efficace mais lourde, trop lourde par rapport aux meilleures du plateau. Pourtant la Rover fait largement appel aux matériaux composites tel le kevlar ou le magnesium. En course si la voiture est capable de réelles performances, elle abandonne souvent faute de fiabilité sur de petits organes souvent mineurs. En fait il semble que l'empattement court de la voiture si séduisant sur le papier s'avère être un lourd handicap sur les bosses même si la marque a fait l'impasse sur les rallyes les plus exigeants mécaniquement (comme le rallye de Côte d'Ivoire). A la problématique de l'empattement se greffe celle de la hauteur de l'auto qui fait 1.65 mètres soit 30cms plus haute que les autres avec un centre de gravité plus haut perché. La voiture saute donc littéralement sur les bosses ce qui n'est pas sans conséquences sur tous les organes fortement secoués. Pour la version client Clubman, changement de décors puisqu'avec 1040 kilos, elle est la plus légère face aux "confortables" 205T16 (1225 kgs), Delta S4 (1280 kgs) ou encore Audi Sport Quattro (1350 kgs). Elle a ainsi le meilleurs rapport poids/puissance tout en étant la seule atmosphérique du plateau avec le plus gros moteur ! Pourtant les prestigieux matériaux en composite de course ont été remplacés par des panneaux en polyester ou en tôle. L'auto est donc ainsi plus lourde. Certes la répartition du poids est de 40% à l'avant et 60% à l'arrière, mais en étant courte et haute, on est baladé comme la voiture sur chaque bosses.
Après 5 années de développement, l'Austin Rover Metro 6r4 est donc officiellement engagée quelques mois seulement avant l'annonce de la fin de la catégorie. La marque a donc suivi attentivement l'évolution de la compétition pendant des années et au moment où elle est enfin prête c'est la fin du match ! Alors sur les 200 exemplaires produits, il en reste finalement pas mal en stock en 1986 (photo). Logique car à environ 455 000 F de l'époque (pour mémoire 290 000 F pour la 205 T16 qui ne se vendait pas vraiment mieux) la voiture ne peut servir que pour la course excluant de ce fait tous les amateurs désireux de se faire plaisir le week-end. A l'époque MG se souci peu des ventes effectives de l'auto produite sous 12 mois comme l'exige la réglementation. L'objectif prioritaire était donc le championnat du monde. Mais avec son stock sur les bras, le groupe anglais cherche une solution pour les écouler lors de l'annonce de l'arrêt de la catégorie. La marque trouve un débouché à l'échelon national puisqu'une compétition est créée spécialement et momentanément autorisant alors l'utilisation de ces Groupes B maudits à la condition qu'ils ne dépassent pas 300cv. C'est chose faite avec les Clubman qui sont alors reconfigurées et passent donc ainsi de 250 à 300cv. Compte tenu des qualités intrinsèques de l'auto, le stock est rapidement écoulé à des tarifs souvent du tiers du prix catalogue. En 10 mois tout le stock était vendu, une société en ayant même acheté 40. La majorité des 6R4 étaient à conduite à droite. Certaines l'ont pourtant été en conduite à gauche. Le V6 exclusif sera alors revendu à TWR qui le réutilisera quelques temps plus tard sur la Jaguar XJ220 (présente elle aussi dans mon blog).
Comme les copines, les 6R4 finiront leur carrière en courses de côte, rallye-cross mais aussi au Paris Dakar.
Valeur de transaction : 40 000 €
Le parking sortie d'usine .... des vrais chasses neige ! :
La version course ou le jeu des 7 erreurs : réponse sous les 2 photos
photo du haut Clubman et photo ci-dessus version usine
Le premier prototype de 1984 :
photos internet